Maison 

 

 

 

 

Il n’y a pas de maison du monde. L’homme n’habite pas le monde. L’homme habite la maison. L’homme habite la maison et la maison habite le monde. L’homme demeure à l’intérieur de la maison et la maison demeure à l’intérieur du cosmos. 

 

 

« Les métaphysiques « de l’homme jeté dans le monde » pourraient méditer concrètement sur la maison jetée à travers l’ouragan, bravant la colère du ciel. » « La maison nous aide à dire : je serai un habitant du monde, malgré le monde. » G. Bachelard

 

Ainsi la chair humaine apparait d’abord jetée à l’intérieur du monde, jetée à l’intérieur de la terreur du monde, de la démesure terrible du monde. Et la chair humaine, l’existence humaine essaie ensuite de filtrer, de cadrer, de donner une forme aux flux du monde, aux flux de terreur du monde par le geste de construire une maison. L’homme n’habite pas le monde. L’homme apparait d’abord jeté à l’intérieur du monde. Ce qui habite le monde ce n’est pas l’homme, ce n’est pas la chair humaine. Ce qui habite le monde c’est la maison. L’homme n’habite pas le monde, l’homme habite sa maison. L’homme construit précisément une maison parce qu’il n’a pas le pouvoir d’habiter immédiatement le monde. L’homme construit une maison à la fois afin d’habiter à l’intérieur de sa maison et afin que sa maison habite le monde. L’homme construit une maison afin d’habiter à l’intérieur de sa maison comme afin que sa maison habite le monde. 

 

 

« La maison ne nous abrite pas des forces cosmiques, tout au plus elle les filtre, elle les sélectionne. » G. Deleuze

 

La maison abrite l’homme des forces du cosmos. La maison abrite l’homme, protège l’homme des forces du cosmos, des forces terrifiantes du cosmos par le geste même de filtrer ces forces. La maison filtre le cosmos. La maison filtre les flux du cosmos, la violence du cosmos, les flux de violence du cosmos afin que l’homme parvienne à se reposer, afin que l’homme parvienne à exister en paix. 

 

 

La maison filtre le cosmos afin de distinguer la forme et l’informe, afin de distinguer les forces de la forme et les puissances de l’informe.

  

 

La maison décante les flux du cosmos. La maison décante les forces du cosmos afin que l’homme parvienne à y reposer en paix, afin que l‘homme parvienne à s’y tenir au repos, afin que l’homme parvienne à s’y tenir en équilibre au repos. 

 

 

La maison maintient des formes. La maison maintient des formes en équilibre. La maison maintient des formes comme usage de l’équilibre et équilibre de l’usage (comme usage de la répétition et répétition de l’usage). La maison maintient les formes de l’usage en équilibre. La maison maintient les formes du besoin en équilibre, les formes de l’usage du besoin en équilibre. 

 

 

La maison invente le lieu des besoins acosmiques. La maison compose le lieu des besoins acosmiques, des usages acosmiques, des besoins d’usages et des usages de besoins acosmiques. La maison donne à sentir le lieu des besoins et des usages acosmiques de la chair. 

 

 

 

A l‘intérieur de la maison, les choses surviennent comme des stupéfiants. Les choses de la maison droguent notre équilibre, l’événement de notre équilibre. Les choses de la maison droguent notre repos, l’équilibre de notre repos. A l’intérieur de la maison, les choses ne sont ni pensées ni senties, les choses apparaissent plutôt mémorisées par l’intuition. A l’intérieur de la maison, les choses ne sont pas mémorisées comme formes du savoir, les choses apparaissent plutôt mémorisées comme formes du tabou, comme formes du tabou à vide, comme forme de l’intuition du tabou, comme forme de l’intuition du tabou à vide. 

 

 

A l’intérieur de la maison, les choses apparaissent comme les formes d’un tabou sans changement, les formes d’intuition de l’immobilité du tabou, les formes d’intuition d’un tabou  qui transforme l’immobilité sans la changer, qui transforme à vide la paralysie même de l’espace.

 

A l’intérieur de la maison, les choses structurent la stupeur, les choses structurent la stupéfaction.  

 

 

A l’intérieur de la maison, les choses affirment une forme de présence structurelle. A l’intérieur de la maison, c’est la structure des choses, la structure de la disposition des choses qui révèle leur singularité. Et cette présence structurelle des choses compose ainsi pour celui qui y demeure une forme d’intuition vide, l’intuition vide d’une insistance paisible, l’intuition vide d’une insistance de la paix, d’une insistance stupéfiante du repos.

 

Cette présence structurelle des choses compose ainsi la domestication de l’homme. Cette présence structurelle des choses invente ainsi la domestication de l’homme. L’homme apparait paradoxalement domestiqué par la présence structurelle des choses de sa maison. 

 

 

Cette domestication de l’homme par sa maison c’est en même temps (à la fois) ce par quoi  l’homme abandonne sa sauvagerie et devient civilisé et ce par quoi aussi l’homme abandonne sa sagesse et devient déraisonnable (à savoir la démence du demeuré). Au dehors de la maison, l’homme apparait à la fois sauvage et sage. A l’intérieur de la maison l’homme apparait à la fois civilisé et dément. 

 

 

La maison apparait comme un refuge c’est à dire comme ce qui répète la fugacité du feu, la fugacité immobile du feu, la fugacité de paralysie du feu. Se réfugier à l’intérieur de la maison, c’est la démence d’essayer de reposer à l’intérieur de la paix du feu. 

 

 

 

« Lorsqu’il entre dans son propre logement, le comportement d’observation cesse généralement pour l’habitant, remplacé par une participation diffuse, une manière décentrée  de se laisser entourer et de se laisser aller. » Sloterdijk, Ecumes

 

Il est impossible de regarder, de contempler sa maison du dedans. Il est impossible de contempler l’intérieur de sa maison. Ce qui de la maison apparait parfois contemplé, c’est seulement le dehors de la maison.   

 

 

« C’était mon foyer, c’est-à-dire l’endroit où l’on ne ressent rien. » F. Pessoa

 

La demeure apparait ainsi comme le lieu de l’anesthésie. Aucun homme n’a l’aptitude de voir, de sentir le lieu où il demeure. La demeure apparait comme le lieu de l’habitude c’est-à-dire  comme le lieu paradoxal d’une anesthésie, le lieu paradoxal  d’un repos de la sensation, le lieu paradoxal d’un sommeil de la sensation. Ce repos de la sensation provoque malgré tout l’audace (le courage) de contempler le dehors. A l’intérieur de la demeure, la chair n’a aucune sensation. A l’intérieur de la demeure les sensations de la chair se reposent et c’est précisément  parce que les sensations de la chair s’y reposent que la chair possède ainsi la force de contempler le monde. Celui qui a une demeure n’a aucune sensation de sa demeure, malgré tout  parce qu’il a une demeure il a la sensation du monde. A l’inverse celui qui n’a pas de demeure n’a jamais la sensation du monde. 

 

 

Le geste d’habiter c’est à dire l’habitude affirme la forme taboue du regard. L’habitude affirme la forme taboue de la contemplation, L’habitude affirme la forme taboue de la lucidité, la forme taboue de la contemplation lucide. (C’est pourquoi des œuvres comme celle de Vermeer ou de Vuillard qui parviennent à donner une image de l’intérieur d’une maison sont proches du prodige.) 

 

 

Quand un homme regarde à l’intérieur de sa maison, il ne voit ni des objets, ni des choses, il voit plutôt des poses d’atmosphères, des poses d’alentours, des poses d’ambiance. L’habitude fait tenir la pose aux alentours. L’habitude fait tenir une suite de poses aux alentours. 

 

 

L’habitude affirme une manière de rythmer sa stupeur, une manière de rythmer son hébétude. L’habitude fait tenir ensemble (fait tenir comme ensemble vide) une suite de poses impensées, de poses irréfléchies, de poses réflexes  L’habitude relie des suites de poses impensées à la stupeur d’un sentiment de paix, à l’hébétude d’un sentiment de paix.

 

 

L’habitude n’est pas une pensée spéculative, une pensée rationnelle, une pensée articulée en concepts. L’habitude apparait plutôt comme une méditation composée de réflexes, de réflexes à l’intérieur de l’espace. L’habitude apparait comme une forme de méditation à vide, une forme de méditation à vide composée par une suite de gestes parmi l’espace. Par l’habitude, la méditation ne s’accomplit pas à travers la pensée du cerveau, la méditation s’accomplit plutôt comme une chorégraphie de la stupéfaction, une chorégraphie de la stupéfaction tranquille, comme une chorégraphie de l’étonnement, comme une chorégraphie de l’étonnement à vide, comme une chorégraphie de l’étonnement sans révélation. 

 

 

 

Aucun homme n’est apte à penser son apparition à l’intérieur de sa maison, même l’architecte qui construit sa propre maison. En effet, l’architecte qui conçoit et construit sa maison ne sait jamais comment il y apparait.

  

 

Aucun homme ne sait comment il médite à vide par gestes, comment il médite à vide par suite de gestes à l’intérieur d’un lieu pensé et construit par d’autres. Et plus encore aucun homme ne sait comment il médite à vide par gestes à l’intérieur d’un lieu qu’il a pourtant pensé et construit. 

 

 

« Chacun est disposé à prendre son environnement quel qu’il soit pour la réalité. » J. Baudrillard

 

Malgré tout chacun préfère aussi considérer le lieu où il demeure, c’est-à-dire le lieu où il a des habitudes, à la fois comme une illusion, et comme une nécessité comme une illusion nécessaire. 

 

 

« La maison ne perd rien. » Handke

 

La maison ne perd jamais les choses. La maison ne perd jamais les choses parce qu’elle sait  donne une forme exacte aux choses qu’elle perd. Seule la maison sait comment donner une forme à l’oubli. Seule la maison sait comment donner une forme à la perte et même à la destruction. 

 

 

« Le plus singulier des regards alors. Vers le bâtiment où j’habite. » Handke

 

C’est un sentiment étrange de regarder sa maison de loin. Un sentiment étrange de regarder sa maison depuis un lieu inconnu. En effet c’est comme si ce lieu inconnu savait quelque chose de ma maison que je ne sais pas et que je ne saurai jamais. Ce sentiment étrange apparait ainsi provoqué par l’intuition que les lieux du monde se regardent aussi les uns les autres, que les lieux du monde se contemplent aussi les uns les autres, que les lieux du monde s’envisagent aussi les uns les autres sans que nous ne parvenions jamais à saisir ces regards. 

 

 

 

« L’habitat représente  donc au début une existence liée à la récolte, à proximité d’une station céréalière. »  P. Sloterdijk

 

La maison apparait non seulement comme le lieu où l’homme attend la récolte, où l’homme attend la pousse et la maturation des végétaux plantés au dehors afin ensuite de les récolter. La maison apparait aussi comme le lieu de la récolte de l’espace même. A l’intérieur de la maison, l’espace pousse et murit, l’espace pousse et murit comme un végétal, l’espace pousse et murit comme un arbre. A l’intérieur de la maison, les murs murissent comme des fruits. A l’intérieur de la maison, l’homme essaie ainsi de récolter cette poussée de l’espace, cette poussée de vide de l’espace, cette pulsion de l’espace, cette pulsion de vide de l’espace.

 

 

Ceux pour qui la maison révèle l’histoire de la terre et ceux pour qui la terre révèle la préhistoire de la maison. Ceux pour qui la maison révèle la préhistoire de la terre et ceux pour qui la terre révèle la météorologie de la maison. 

 

 

 

Il y a de multiples manières de métaphoriser la maison, de métaphoriser la maison comme  fragment de la chair. Il y a la maison-ventre, la maison qui nous mange et que nous mangeons. Il y a la maison-utérus, la maison-refuge, la maison qui abrite. Il y a la maison-cerveau, la maison qui pense (celle de Shining de Kubrick). Il y a la maison-crâne (la maison qui rêve et qui écrit, la maison-écran qui projette comme apparait projetée (celle des films de Tarkovski). Il y a la maison-poitrine, celle qui respire. Il y a la maison-squelette (ou encore la maison-dos), celle qui équilibre. Il y a la maison-musculature, celle qui schématise. 

 

 

Imaginer la maison comme ventre de la mère ou crâne du père. Imaginer la maison comme ventre du père ou crâne de la mère. Imaginer la maison comme main de l’âme sœur. Imaginer la maison comme poitrine de l’âme sœur. Imaginer la maison comme fesses de l’âme sœur. Imaginer la maison comme  dos de l’âme sœur. Imaginer la maison comme ventre de l’âme sœur. Imaginer la maison comme crâne de l’âme sœur. 

 

 

 

La maison mange. La maison mange ceux qui y demeurent et à l’inverse aussi ceux qui y demeurent mangent la maison. Il y a ainsi une forme de dévoration réciproque de la maison et de ceux qui y demeurent. 

 

 

La maison apparait comestible. La maison apparait aussi cosmétique. La maison apparait à la fois comestible et cosmétique. La maison apparait à la fois comme une nourriture et une parure. La maison apparait comme une parure de nourriture et comme une nourriture de parure. La maison apparait comme la parure de nourriture de l’espace et comme la nourriture de parure de l’espace. 

 

 

Il y a toujours quelque chose de comestible à l’intérieur de l’architecture. Demeurer c’est toujours une manière de manger l’espace. Demeurer c’est toujours une manière de manger les formes de l’espace. Demeurer c’est toujours une manière de dévorer les formes de l’espace. Architecturer c’est  toujours une manière de manger les métamorphoses de l’espace, les métamorphoses de précision de l’espace. 

 

 

La maison danse. La maison danse avec les sentiments. La maison danse avec les sentiments de ceux qui y demeurent. Lae maison danse à l’intérieur de l’espace ou danse à l’intérieur du temps. La maison danse avec les mains du temps et les pieds de l’espace. La maison danse avec les mains de l’espace et les pieds du temps. La maison danse avec les sentiments du temps et les sentiments de l’espace. La maison danse avec les sentiments de temps et les sentiments d’espace de ceux qui y demeurent.   

 

 

La maison donne le sentiment. La maison donne le sentiment de se profiler. La maison donne le sentiment de l’habitude. La maison donne le sentiment de profiler l’habitude. Ce que la maison montre c’est le profil de l’habitude, le schéma d’habitude de celui qui y demeure. 

 

 

 

La maison apparait comme la danse de sa dévoration. La maison apparait comme la danse de dévoration de demeurer, comme la danse de dévoration du geste de demeurer. 

 

 

La maison danse l’espace. La maison danse la nourriture de l’espace. La maison danse la parure de l’espace. La maison danse la nourriture de parure de l‘espace comme la parure de nourriture de l’espace. 

 

 

La demeure donne la démence. La demeure dévore la douleur. La demeure compose le désespoir. 

 

 

« Il y a des individus qui retrouvent la raison en quittant leur domicile et qui la perdent de nouveau en y entrant. La maison favorise la folie et les maladies nerveuses. » G. Ceronetti

 

Il y a plusieurs types de démence en relation avec la maison. La démence de rester à la maison à savoir la démence du demeuré. La démence de désirer sans cesse quitter la maison, la démence du voyageur. La démence de de désirer sans cesse changer de maison, la démence de celui qui déménage. La démence de celui qui désire sans cesse revenir à la maison, la démence du nostalgique. La démence de celui qui désire construire la maison sans jamais achever cette construction. La démence de l’architecte de l’inachevé, la démence de l’architecte de l’enfance. La démence de celui qui désire détruire sa maison, la démence de l’architecte de la destruction. 

 

 

Le demeuré à savoir celui dont la maison est la forme même de son délire apparait ainsi comme celui dont la maison a dévoré le cerveau. Le demeuré utilise son cerveau pour trouver sa maison, pour trouver la trajectoire de chute de sa maison. Et quand le demeuré a trouvé sa maison, sa maison mange alors son cerveau. 

 

 

 

« Les demeures ont des noms propres, et sont inspirées. « Les inspirés et leur demeure. » (…) C’est avec la demeure que surgit l’inspiration. »  Deleuze, Mille Plateaux

 

La maison apparait comme espace de l’inspiration. La maison apparait comme espace de l’habitude, comme espace paradoxal de l’habitude, comme espace paradoxal de l’habitude d’où surgir l’inspiration. A l’intérieur de la maison l’habitude compose le trampoline de l’inspiration. A l’intérieur de la maison l’habitude improvise le trampoline de l‘inspiration. L’habitude paradoxalement improvise le trampoline de l’inspiration, le trampoline d’ascèse de l’inspiration, le trampoline de miracle de l’inspiration, le trampoline d‘ascèse miraculeuse de l’inspiration. L’habitude improvise de manière paradoxale le trampoline de certitude de l’inspiration, le trampoline d’aisance de l’inspiration, le trampoline de certitude aisée de l’inspiration. L’habitude improvise de manière paradoxale à l’intérieur de la monotonie, à l’intérieur de la monotonie de l’espace le trampoline de miracles de l’inspiration, le trampoline de certitude miraculeuse de l’inspiration, le trampoline de certitude miraculeuse aisée de l’inspiration. 

 

 

Savoir demeurer à l’intérieur de sa maison comme à l’intérieur d’une blessure. Savoir demeurer à l’intérieur de sa maison comme à l’intérieur d’une blessure absolue. Savoir demeurer à l’intérieur de sa maison comme à l’intérieur d’une blessure de sommeil. Savoir demeurer à l’intérieur de sa maison comme à l’intérieur d’une blessure de sommeil absolu. 

 

 

« Les maisons semblent s’être couchées sur le côté pour mieux s’endormir. » P. Besson

 

Il existe un sommeil des maisons. Où dorment les maisons ? Comment dorment les maisons ?  Les maisons ne dorment pas à l’intérieur de l’espace. Les maisons ne dorment pas à l’intérieur du cosmos. Les maisons dorment plutôt comme immiscées à l’intérieur du temps, à l’intérieur du vide de temps où l’espace coïncide avec le cosmos, à l’intérieur du vide de temps de la coïncidence de l’espace et du cosmos, à l’intérieur du vide de temps où le silence de l’espace coïncide avec le conversation du cosmos comme à l’intérieur du vide de temps où la conversation de l’espace coïncide avec le silence du cosmos. 

 

 

L’homme calme construit sa maison à l’intérieur de la nuit. L’homme sage et calme sait comment construire sa maison à l’intérieur de la nuit. 

 

 

 

« Qu’exige la maison ? Non pas un propriétaire mais un gardien ; elle exige d’être gardée. » 

Handke.

 

Le problème reste malgré tout de savoir avec quoi garder la maison. Ceux qui gardent la maison avec le cœur. Ceux qui gardent la maison avec la poitrine. Ceux qui gardent la maison avec les mains. Ceux qui gardent la maison avec le crâne. Ceux qui gardent la maison avec l’excitation du cœur. Ceux qui gardent la maison avec la paix de la poitrine. Ceux qui gardent la maison avec la virtuosité des mains, avec l’élégance des mains. Ceux qui gardent la maison avec le miracle du crâne. Ceux qui gardent la maison avec la paix du cœur. Ceux qui gardent  la maison avec la pulsion de la poitrine. Ceux qui gardent la maison avec le miracle des mains. Ceux qui gardent la maison avec le calme du crâne. Ceux qui gardent la maison avec le hurlement du cœur. Ceux qui gardent la maison avec le sourire de la poitrine. Ceux qui gardent la maison avec la paix des mains. Ceux qui gardent la maison avec l’extase du crâne. 

 

 

Il y ainsi plusieurs manières de garder la maison. La maison gardée par un homme. La maison gardée par un animal. La maison gardée par un arbre. Et aussi un homme gardé par sa maison. Je suis cet homme. Je suis cet homme et inconnu. Je suis cet homme et l’inconnu de la maison. Je suis un homme gardé par l’inconnu de sa maison. 

 

 

« L’art commence peut-être  avec l‘animal, du moins avec l‘animal qui taille un territoire et fait une maison. » Deleuze

 

Chaque œuvre d’art apparait comme une maison animale. Chaque œuvre d’art apparait comme la maison animale de l’immédiat, comme la maison animale de l’inconnu, comme la maison de l’immédiat inconnu. Chaque œuvre d’art apparait comme la maison animale de l’extase. Chaque œuvre d’art apparait comme la maison animale de l’extase immédiate, comme la maison animale de l’extase inconnue, comme la maison animale de l’extase immédiate inconnue. 

 

 

 

« L’homme alphabétisé n’a plus besoin de considérer sa maison comme une extension de son corps. »  Sloterdijk

 

Pour le monstre analphabète, la maison apparait comme une forme à la fois problématique et projectile de sa chair. Le monstre analphabète à la fois porte et projette sa maison avec sa chair. Il existe ainsi de multiples styles de monstruosité analphabète. Chaque monstre analphabète porte et projette (porte comme projette) sa maison à sa manière. Parfois le monstre porte et projette sa maison avec le même fragment de sa chair, parfois avec des fragments distincts. Il y a par exemple le monstre analphabète qui porte et projette sa maison avec ses mains ou celui qui porte sa maison avec ses mains et projette sa maison avec son crâne, ou celui qui porte sa maison avec son crâne et projette sa maison avec ses mains. Il y a le monstre analphabète qui porte sa maison avec sa bouche et projette sa maison avec sa poitrine ou celui qui porte sa maison  avec sa poitrine et projette sa maison avec sa bouche. Il y a le monstre analphabète qui porte sa maison avec son dos et projette sa maison avec ses cils ou celui qui porte sa maison avec ses cils et projette sa maison avec son dos. (…) 

 

 

 

Ceux qui habitent leur maison comme si leur maison révélait l’échiquier de leurs besoins. Ceux qui habitent leur maison comme si leur maison révélait le puzzle de leurs passions. 

 

 

Ceux qui font le tour du monde afin de retrouver ensuite leur maison. Ceux qui font le tour de leur maison afin ensuite de retrouver le monde.  

 

 

La maison aimante les dernières volontés du miracle. Le miracle admire les dernières volontés de la maison. 

 

 

L’architecture donne une forme de temps aux gestes de l’immortalité. L’architecture donne une forme de temps civilisé aux gestes inhumains de l’immortalité. L’architecture donne une forme d’immortalité civilisée aux gestes d’inhumanité du temps.