Hydre d’Etoiles de l’Alcool

 

 

 

 

 

Bonjour Jean-Daniel, 

 

 

 

« La seule chose qui nous appartienne vraiment ce sont nos os. »  Ramon Gomez de la Serna

 

 

 

Et à propos de la lune je t’envoie un extrait d’En Rade de J. K  Huysmans.

 

 

 

 

« A perte de vue, une mer furieuse roulait de vagues hautes comme des cathédrales et muettes. Partout des cataractes de bave caillée, des avalanches pétrifiées de flots, des torrents de clameurs aphones, toute une exaspération de tempête tassée, anesthésiée d’un geste. (…) Ici, de sédentaires maelstroms se creusaient en d’immobiles spirales qui descendaient en d’innombrables gouffres en léthargie ; là, des nappes indéterminées d’écume, de convulsifs Niagara, d’exterminatrices colonnes d’eau surplombaient des abimes, aux mugissements endormis, aux bonds paralysés, aux vortex perclus et sourds.

Il réfléchissait, se demandant à la suite de quels cataclysmes ces ouragans s’étaient congelés, ces cratères s’étaient éteints. (…) Et plus loin, encore plus loin, émergeaient du cercle des horizons devinés d’autres chaines de montagnes dont les interminables pics effleuraient le couvercle de nuit du ciel, un couvercle seulement posé sur les pointes de clous des cimes, en attendant qu’un surnaturel marteau l’enfonçât d’un coup pour clore hermétiquement  l’indestructible boite ! »

 

 

Si on fait sursauter une machine à café on obtient un poulpe, (plutôt l'inverse) effrayez un poulpe et il vous sert un café. 

Ce qui m’étonnait quand je jouais au football, c’était l’aspect de poulpe des équipes de joueurs. Quand tu joues au football au poste de gardien tu as en effet l’impression que les deux équipes ressemblent à des sortes d’hydres qui se répondent à chaque instant à la fois physiquement et télépathiquement. Chaque joueur apparait alors soit comme un œil soit comme un tentacule de ce poulpe, de cette hydre. Ainsi quand tu joues gardien, à l’instant où l’équipe adverse développe une attaque, tu as l’impression d’une hydre gigantesque qui se déploie face à toi. C’est l’aspect féerique du football, tu as le sentiment comme gardien de combattre un dragon. A cette différence près que tu disposes afin de combattre ce dragon non seulement d’une épée mais aussi d’un autre dragon, le dragon de ta propre équipe, le dragon de l’équipe à laquelle tu appartiens. Le problème du jeu du gardien c’est ainsi de savoir comment répondre aux gestes du dragon qui se déploie à chaque instant devant toi. Quand tu joues gardien il n’est pas cependant nécessaire de répondre à chaque fois au geste de l’adversaire qui a le ballon, cette attitude c’est justement celle qu’adopte spontanément celui qui n’a jamais joué au poste de gardien et elle est trop rudimentaire pour être efficace. Pour jouer gardien de manière efficace il n’est en effet même pas nécessaire de répondre aux gestes des joueurs eux-mêmes, ce qui apparait nécessaire c’est de parvenir à répondre à la fois aux gestes du ballon, parce que le ballon a des gestes particuliers, des gestes particuliers de celui qui n’en imagine qu’à sa tête, de celui qui n’en imagine qu’à sa tête de vide, de celui qui n’en imagine qu’à sa terre de vide, qu’à sa tête-terre de vide et de répondre aussi aux gestes de l’équipe adverse (adverse et aussi qui sait averse je veux dire à la pluie d’hommes que tu affrontes), de répondre aux gestes innombrables de l’hydre de l’équipe adverse. Il y a alors le plus souvent deux manières de répondre, soit par violence soit par subtilité c’est-à-dire soit en tranchant un tentacule de l’hydre de l’équipe adverse autrement dit en s’interposant dans la relation entre deux adversaires, soit en séduisant, en détournant de son chemin cette relation entre les adversaires et en devenant alors la destination de cette trajectoire. C’est une manière de ravir au vol la trajectoire des adversaires. Le plongeon apparait ainsi comme une forme de kidnapping, de kidnapping euphorique à savoir comme une forme de ravissement, kidnapping euphorique parce que par le geste de saisir le ballon au vol, le gardien s’amuse ainsi à voler l’invention d’enfance de l’autre. 

 

« Il ne faut jamais applaudir (…) ceux qui jouent mais seulement le ballon qui est le seul joueur qui existe dans un stade.  »   S. Pey 

 

Le ballon n’est pas un joueur. Le ballon apparait comme le jeu. Le ballon apparait comme l’incarnation du jeu. Ou plutôt le ballon apparait comme la peau du jeu. Le ballon apparait comme le globe de peau du jeu. Le ballon apparait comme la planète de peau du jeu. 

 

 

 

de la fumée ouvre la porte, mon chat essaie de coincer une herbe dans son squelette, le squelette du chat est pris dans la fumée, c'est très doux, la souplesse de coincer des herbes entre ses os, 

 

Eh bien ça Jean-Daniel, c’est une fois encore magnifique. 

 

 

 

"les étoiles c'est du sel qui tombe à deux à l'heure" 

 

Les étoiles éternuent les yeux du ciel. Les étoiles éternuent le sel du ciel. Les étoiles éternuent les yeux de sel du ciel. Les étoiles éternuent le tact du ciel. Les étoiles éternuent le tact de sel du ciel. Les étoiles éternuent les cils du ciel. Les étoiles éternuent le tact de cils du ciel. Les étoiles éternuent les cils de sel du ciel.

Les étoiles salent le ciel. Les étoiles salent les yeux du ciel. Les étoiles salent le tact du ciel. Les étoiles salent le tact d’yeux du ciel. Les étoiles salent l’éternuement du ciel. Les étoiles salent le tact d’éternuement du ciel, l’éternuement de tact du ciel. Les étoiles salent les yeux d’éternuement du ciel, l’éternuement d’yeux du ciel. Les étoiles salent les cils du ciel, les cils d’éternuement du ciel, l’éternuement de cils du ciel. 

 

est-ce que l'alcoolisme est amphibie ? 

L’alcoolisme affirme le geste à la fois amphibie et ambigu du feu, à savoir le geste amphibologique du feu. L’alcoolisme affirme la tentation de savourer l’amphibologie du feu. L’alcoolique boit l’amphibologie amphibie du feu. L’alcoolique boit le feu amphibie du vide. L’alcoolique boit le feu amphibologique du vide. L’alcoolique boit le feu à la fois amphibie et amphibologique du vide. 

 

Et le soir au bord de l’étang, la bacchanale tonitruante des batraciens, l’amphigouri amphibie des grenouilles.

 

 

 

Les cerises sont les pendentifs 

 

Les cerises cernent les pendentifs de l’enfance. Les cerises cernent les bijoux de l’enfance. Les cerises cernent les bijoux de l’enfance pendue. 

 

 

Jouer du clavecin c'est comme trier des abeilles, 

 

Jouer du clavecin c’est comme jongler avec les abeilles. Jouer du clavecin c’est comme jongler avec les abeilles de l’éblouissement.

 

 

 

 

 

 

                                                                                                  A Bientôt                         Boris

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Bonsoir Boris, 

 

(…)

 

Pour vider le dernier sablier dans les chansons, en ce moment j'évite les lectures, de penser à des phrases.  Le passage de l'ouïe dans le walkman maintient l'emplacement de la tête.  j'essaie de faire slalomer ma tête entre les oreilles, est-ce que les oreilles sont des fossiles de gifles, des fossiles pâte à fixe de gants de gardien de but. Au début par grand froid on glissait se mains dans ces anciennes gifles pour ses chauffer. Une phrase très belle dans un film de Raoul Ruiz pourtant " O qu'il est obéissant ce ballon, j'aime bien le sentir tout contre moi, comme une planète" dans "L'île des pirates".  Le temps oublie qu'il fait cuire le sable avec des graines. Parfois je regarde un film d'horreur, j'ai l'impression qu'une blessure est une issue de secours pour le sang.  Un ami allemand m'a traduit une phrase tirée d'une chanson, que j'ai sans doute un peu transformée, je trouve ça vraiment au poil " Chaque fois que dieu se tire une balle dans la tête ça rajoute un étage à l'immeuble". 

 

 

 Faire un disque génère des écoutes, d'abord ce disque est écouté par celui qui le fait, on le fait en écoutant, en l'écoutant, en devenant l'écoutant du disque :  plus tu l'écoutes plus ça se fait le disque, l'écoute produit de la durée. L'écoute c'est entendre la musique qui grandit. Et l'auditeur lui aussi génère des écoutes qui font entendre le qui-vive de la longévité, le qui-vive de l'agrandissement de musique. Joseph Deltheil dit " la télé augmente mes yeux"  Il faut inventer une organisation du temps comme réceptacle sonore. L'écoute creuse l'emplacement du temps. c'est émouvant d'avoir des portions de temps qui gonflent, on dirait que la chanson produit du temps, du temps arrive, écouter c'est du temps qui arrive, laisser arriver une chanson pour y déposer des évènements, une suite d'évènements musicaux laissent toujours dépasser une chanson. Parfois on fait des chansons assez brèves pour donner l'heure. 

 

 

Voici un extrait (non mixé sans ingénieur) et ce qui me rend heureux c'est que tu seras le premier à l'entendre :  "Bruyant qu'brillant"  

 

 

J'ai vu un très beau film de Stévenin "Passe montagne" avec Florian. 

 

 

Sur les coutumes du sol on pose un crocodile, on pose une carte qui respire du dos comme un crocodile, les vieilles cartes ont des branchies pour plier l’air, j’ai vu ça dans un film, où l’on peut faire loucher une forêt avec un viseur de Mercedes, où il faut trouver un territoire d’arrêt  pour enterrer une place de parking. Les cigarettes c’est comme des doigts secs qu’on trouve dans la neige, on en ramasse en courant c’est une décision pour l’essoufflement hors des voitures, et Villeret est un élément important dans la recette de l’eau du bain, il mange des petits fours en étant lui même un plat chaud.

 

 

à bientôt Boris.

 

 

Jean-Daniel

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Bonjour Jean-Daniel, 

 

 

 

Un titre génial de Guillaume Decourt : Le Chef d’Œuvre sur la Tempe. 

 

 

 

 

 

 

 

                                                                                                  A Bientôt                         Boris