Alléluia, il manque l’harmonica.

 

 

 

Ce matin j’aiguise mon ouïe, pour arriver à des milliers de cils auditifs. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Mes papillons sont les voix et les images qui volent avec moi. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Evidentiation- le barbarisme du jour : évidentier. Alléluia, il manque l’harmonica. 

 

Marteler pour fixer le chant boiteux. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Les dés comme les mots n’abolissent pas l’attente. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

 

 

Je suis ici mais qui suis-je ? Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Mon nom est une fiction. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Et Berka Solo, elle est restée dans le jour d’hier. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

 

 

Beaucoup de choses ont manqué à ma bouche : les mots maternels et les mots adoptés. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Comme moi, tel ce gel résistant, je n’adhère pas à l’émail électronique. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Une voix lactée inédite, la voûte céleste ce matin dans ma bouche. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Dans une grande ville, pleine de gens comme une bouche pleine de dents. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Les sons sortent de la bouche, parmi ses dents comme des enfants en vacances, sortant parmi les lattes en bois espacées ou cassées d’une haie. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

 

 

Mais ce matin, sceptique jusqu’aux fosses temporales. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Femme peccamineuse, homme impeccable. Ou l’inverse. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Ne pas dormir, autrement qu’en une veille retournée. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Mais comme aujourd’hui, une cicatrice ouverte et fermée à la fois. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Je suis venu photographier Jésus : oh, vanité des vanités. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

 

 

Je fais toujours ma poire, ah oui, ça oui, hohoho. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Forger sa mort. En forgeant, le forgeron fait son son : à bonne flamme, bon son ! Proverbe du jour, ad hoc. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Menée par la lumière – comme Cavaillès, Spinoza ou Leibniz et comme le camélia. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

 

 

Il y a un essentiel même de l’inessentiel. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

L’idée qu’une mémoire totale est aussi anesthésiante qu’un manque total de mémoire. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Mémoire, silence de la mémoire aussi. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Se molletiner aux choses. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Ma mollesse est vive et ma vitesse molle. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Je suis à l’étroit dans le noir, dans mon entonnoir, dans le grand inconnu. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Je vais ranger la limaille qui résiste, elle est déjà collée. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Ni peur, ni malheur, ni souci, juste l’inquiétude d’être. Ici. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Je voi-cise. Lire voie-cise ! Alléluia, il manque l’harmonica.

 

 

 

Sourire ! Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Mais ce matin, sourire ! Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Mais ce matin, l’exclamation du sourire ! Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Mais ce matin, le maïs de la lumière, les mâchoires de maïs de la lumière. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

Mais ce matin, le maïs de la lumière, les mâchoires de maïs de la lumière, l’exclamation du sourire, l’exclamation de suicide du sourire. Alléluia, il manque l’harmonica.

 

 

 

Alléluia, il manque l’harmonica. L’abolition du ménage est tout un art.

 

Alléluia, il manque l’harmonica. Et le reste est silence. Et le reste est silence, silence des amis-agneaux.