Son cœur est le centre du monde, son estomac est le centre du monde, son regard est le centre du monde, son sexe est le centre du monde, sa liberté est le centre du monde, son odeur est le centre du monde et son corps n'existe pas.
Son visage est une porte. Son ventre est une porte. Sa bouche est une porte. Ses yeux sont des portes. Ses cheveux sont des portes. Sa nuque est une porte. Son odeur est une porte. Et il n'existe qu’une seule clef pour ouvrir ces portes, c’est l’intégralité de son corps.
Le nez, il le nomme le nez ou autrement quand il sait ce qu'il dit la naissance. La bouche il la nomme la bouche ou autrement quand il sait ce qu'il dit la chute libre. Les yeux il les nomme les yeux ou autrement quand il sait ce qu'il dit les yo-yo de l'exil. Le sexe il le nomme le sexe ou de même quand il ne sait pas ce qu'il dit le cerveau du vide. L'anus il le nomme l'anus sinon presque parce qu'il ne sait pas où il dit le hasard de l'ascèse. Le corps il le nomme le corps ou autrement quand le vide ne sait pas ce qu'il dit.
Chacun de ses organes est double. Son cœur se dédouble en cœur et en guillotine d’un cœur, sa bouche en bouche et en guillotine d’une bouche, son nez en nez et en guillotine d’un nez. Heureusement un des fragments de son corps est parvenu à s’extraire de cette duplicité automatique, l’extrait d’orgie de sa discrétion.
Il n'est jamais intégralement visible, il clignote. Il révèle des parties de son corps selon ses sentiments. Lorsqu’il a peur, on ne voit que son nombril. Lorsqu’il prie on ne voit que son anus. Lorsqu’il rêve on ne voit que ses paupières. Lorsqu’il se souvient, on ne voit que ses narines. Quand il apparait joyeux, seule sa bouche devient visible. Et quand il est triste, on ne le voit plus.
Chaque molécule de son corps est mariée, avec une molécule d’un autre corps ailleurs. La molécule qui se situe à l’extrémité de son nez est mariée avec la molécule qui se situe à l’extrémité de la queue du kangourou du zoo de Reykjavík. La molécule centrale du douzième cil en partant de la gauche de son œil droit est mariée à une molécule de la touche « enregistrement » du magnétoscope d’une femme dont le nom est identique à la marque de son téléviseur. Les relations adultères de chacune des molécules de son corps avec celles d’autres molécules de la planète n’ont pour lui aucune valeur sacramentelle, ce sont celles du hasard.
Entre chacun de ses organes, il y a une frontière, un poste de douane où quelqu’un vérifie si aucune identité ne voyage sans autorisation. Les douaniers ne sont pas d’authentiques douaniers néanmoins ce sont d’authentiques acteurs. D’ailleurs la frontière entre ses organes est elle aussi un simulacre d’atomes, une feinte de corps, une cicactrice.
Ses organes se volent à chaque instant les uns les autres. Son cerveau a d’abord choisi de faire la police avant de s’apercevoir qu’il n’était rien d’autre que le résultat de ces innombrables vols réciproques.
Son corps semble reposer dans les parages de sa pensée.
Son corps ne demande rien. Son corps exige, cependant il n’exige pas d’autres corps. Son corps exige des pensées, des montagnes, des cercueils, des plaines.
Son corps apparait quasi intégralement formé de sperme coagulé. Quand il jouit il éjacule son squelette, l’habitude de son squelette, l’habitude d’hésitation de son squelette.
Son corps ressemble à un jeu d’échecs, un jeu d’échecs où deux joueurs combattent avec courtoisie. Ces deux joueurs sont le visage et le nom. Cependant quand il s’éveille il sait que son corps a parfois aussi une autre structure. Son corps devient alors un jeu où combattent le visage, le nom et le jeu d’échecs lui-même.
Son corps est le jeu de cache-cache de son visage et de son anus.
Chacun de ses organes est un dé, un dé qui se suicide en se changeant en cerveau, le cerveau de l’incohérence des seuils.
Innombrables sont ceux qui viennent à chaque instant lui apporter des cadeaux, n'importe quoi excepté un visage. En échange, il accorde des morceaux de son corps. Il désirerait raconter ainsi une multitude d’histoires, cependant il ne dit alors que la première et la dernière phrase de la géographie de son tombeau.
Il ne dispose d’un corps que lorsqu’il se souvient d’une hypothèse de son souffle. C’est pourquoi ses sentiments ne sont libres que de rester posthumes.
Son corps dispose depuis toujours du hasard d’humour de sa mort. Le cercueil de ses mains forme ainsi l’abstraction d’absurdité de son cœur.
Son sens tactile est raciste et cependant ses autres sens ont plutôt des tendances cosmopolites.
Il crucifie chacun de ses poils, chacun de ses cheveux, chacun de ses regards, chacune de se secrétions afin ainsi d’éviter qu’un jour une foule raisonnable décide de crucifier son corps.
Son sexe est une machine à penser. Son cœur excuse la gloire d'un crime incognito.
Il décalque son cœur avec les fractures de son souffle. Son haleine hallucine des naufrages de nombres.
Il a la nuque à l’intérieur de la gorge. Son désir décalque l’orgueil incognito de sa douleur.
Il est asphyxié par la fièvre hilare et testamentaire de l'écho. Sa gorge est imprégnée par la chevelure d'hésitation de ses rêves.
Ses dents sont recroquevillées au centre de la chevelure de sa gloire. C'est pourquoi les mâchoires de ses oreilles pleurent parfois comme des tempes de revolver.