Il met un uniforme lorsqu’il désire rester vraiment seul.

 

 

 

Il s’habille comme il dit au revoir et à bientôt à sa nudité.

 

 

 

Il apparait à chaque instant nu et il ne s’habille que pour faire l’amour.

 

 

 

 

 

Son imagination révèle le geste de changer de vêtement. Il parle et se tait selon une oscillation qui a un aspect étrange. En effet, il dispose chaque jour d’un vêtement pour parler et d’un vêtement pour se taire. Il s’habille ou de se déshabille à chaque fois qu’il prend ou qu’il perd la parole. Le travail de son imagination nécessite ainsi autant de souplesse musculaire que d’aisance mentale. Il sait que cette manière de s’habiller et de se déshabiller ainsi à chaque instant l’épuise, malgré tout cela ne lui déplait pas, parce qu’il sait aussi que c’est la seule chose qu’il soit jamais parvenu à accomplir.

 

 

 

Il dispose d’un vêtement pour parler, d’un vêtement pour se taire et de la nudité d’un prénom disparu afin de respirer.

 

 

 

 

 

Il croit que chaque homme qu’il ne connait pas et ne connaitra jamais est identique à lui-même. Il croit que chaque homme qu’il lui est impossible de rencontrer est le sosie de son suicide. C’est la raison pour laquelle  même lorsqu’il est seul il ne se déshabille pas de peur d’être condamné à mort à perpétuité à travers le tribunal de liberté de ses organes génitaux. Même en rêve il n’est jamais nu. Même le jour de sa naissance il n’a pas été nu. Il ignore glorieusement la nudité extérieure et ne connait que la nudité criminellement intérieure. C’est comme si il était habillé à chaque seconde à travers l’obligation distraite d’être en vie.

 

 

 

Il croit être habillé simultanément par des idées et par des êtres humains. Il croit par exemple que son pantalon est un principe de thermodynamique et aussi le plombier de son voisin.

 

 

 

Il croit qu’il suffit d’être habillé pour être propre. Il adore l’acte de s’habiller en tant que flagrant délit de l’hygiène. Il croit que l’hygiène n’est rien d’autre que de se changer en esclave de l’idylle de ses vêtements.

 

 

 

 

 

Il regarde fonctionner sa machine à laver comme d'autres regardent éclore les fleurs. Le labyrinthe ombilical du linge l'apaise. Il est heureux de voir ce pétrin de paupières multicolores, ce chaudron de pétales mâchonnées. Il est heureux de savoir l'élégance suave de ses vêtements ainsi hallucinée comme le ronronnement cyclopéen d'une flore intestinale.

 

 

 

Il reste fidèle au labyrinthe de ses vêtements d'enfant. Plus il vieillit, plus il donne le sentiment de se dévêtir. Il sait ainsi qu’à l'instant de sa mort il reposera uniquement paré par la nudité de sa mémoire.