Sa demeure survient composée par des jets de pierres. Il ne sait pas par qui ses pierres lui sont offertes, qui les lui jette ainsi avec une violence désinvolte et il ne cherche pas à le savoir. Il préfère s’amuser à exister à l’intérieur de cette pluie minérale d’inconnu. Dans sa demeure, marcher, manger ou rester simplement assis, nécessite à la fois une extrême ascèse et une extrême insouciance. Dans sa demeure, la forme de son repos est semblable aux acrobaties de terreur de son euphorie.

 

 

 

Dans sa demeure, il apparaît tabou de rester debout, allongé ou assis. Dans sa demeure, il apparaît préférable de rester accroupi comme l'escargot de l’orage s'enracine à l’intérieur de la translucidité du ciel.

 

 

 

Sa maison ressemble un animal mythologique. Sa maison ressemble à un animal inconnu du dehors et comestible du dedans.

 

 

 

 

 

Il demeure depuis toujours dans une maison de voix. Son problème est ainsi de savoir comment inventer des portes et des fenêtres. La seule manière est de souffler sur une voix afin de la transformer. Quand le souffle rêve comme une cible apparaît une porte. Quand le souffle somnole comme une flèche apparaît une fenêtre.

 

 

 

Il aimerait que les portes de sa maison au lieu d’avoir des serrures aient plutôt des sœurs.

 

 

 

 

 

Quand il est en dehors de sa maison il a l’impression d’être le prisonnier de sa maison et quand il est dans sa maison, il a l’impression que sa maison est la prisonnière de son propre corps.

 

 

 

Il retourne à sa maison même lorsqu’il se trouve déjà dans sa maison. C’est pourquoi ses paupières semblent chastes comme des tombeaux de paroles.

 

 

 

Il est jaloux de sa maison. Il craint que sa maison ne le trahisse avec ses amis. Il craint même que sa maison ne le trahisse avec les objets qui y sont déposés, avec l’air qui la traverse et même avec le feu qui déciderait de la détruire à jamais. C’est la raison pour laquelle il s’est placé sur le seuil de sa maison pour surveiller ce qui pourrait y survenir. Ainsi placé il refuse de dormir et l’insomnie même l’ignore. Il est donc le mime simultané du seuil de sa maison et de la succession des jours.

 

 

 

 

 

Il habite au centre de l’abattoir des hallucinations. Son visage est le cerveau ventriloque d’une bombe.

 

 

 

Il habite l’abattoir des limites, là où les paupières décalquent des supplices de scepticisme, là où les funérailles sont des enfants et les cicatrices des papillons.

 

 

 

 

 

Sa bibliothèque semble démente comme une jungle éblouie. II affirme qu'à chaque fois qu'il lit un livre, il fait renaître un arbre, l'arbre qui précisément avait été détruit afin de publier ce livre. Il désire transformer ainsi son corps en une encyclopédie paradoxale. A chaque organe correspondra une forme de savoir particulière. Dans l'estomac, l'histoire. Dans les poumons, la physique. Dans le cœur, les mathématiques. Dans la colonne vertébrale, la philosophie. Et à l'intérieur du visage, le hasard de certitude de l'inconnu.

 

 

 

Sa bibliothèque apparait composée de l’ensemble des lits où il a dormi. Il est extrêmement fier de la forme singulière de son savoir. Il affirme avoir lu l’intégralité de chaque lit, avoir feuilleté d’innombrables fois leurs draps et avoir annoté avec passion chacun de leurs oreillers. Dans une chambre vide à proximité de sa bibliothèque, il y a un gigantesque livre ouvert à l’intérieur duquel sa bêtise de temps à autre dort. 

 

 

 

A l'intérieur de la bibliothèque des regards, boire de l'alcool révèle le hasard d'oublier l'ivresse. C'est pourquoi chaque lecteur préfère y boire la translucidité des fenêtres.