Cher Boris, j'ai eu fort à faire ces derniers temps, avec seulement une miette de cervelle entre les deux yeux et les aoûtats qui continuent de me bouffer, comme si on n'approchait pas de la fin septembre ! Je n'ai pas lu encore tes notes sur Bertrand Blier, je le ferai cette semaine.    

 

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   J'ai vu avant-hier avec Dominique la Jeanne de Bruno Dumont. Elle n'a pas la richesse de sa Jeannette, mais nous a quand même pris à la glue sur nos sièges de cinéma. L'actrice est sidérante. Quand Dumont lui fait regarder la caméra, son regard nous transperce et s'arrête durement en nous. Comme son prédécesseur, mais de façon plus exclusive, je crois, ce film est un film sur le courage, la volonté, la virtus, et non sur le spirituel, ainsi que Dumont le prétend dans ses interviewes toujours trompeuses (en tout cas dans celle qu'il a donnée à JDA, le Journal des Amiénois ! je n'ai lu que celle-là).

 

   La musique de Christophe "marche", il n'y a pas à dire.

 

   Hier nous sommes allés voir dans une très belle église de campagne (qui ne tiendra plus longtemps debout : rien n'a été entrepris pour la sauver) la grande exposition d'un peintre local dont je n'avais jamais entendu parler, Jean-Louis Liget. Du costaud. J'ai un peu parlé avec lui, mais il m'a paru que sa peinture le dépassait, en tout cas il en est resté dans ses propos au niveau "anecdotique", qui à ce moment-là ne m'intéressait pas. Par contre il se trouvait là un homme d'une soixantaine d'années, genre conseiller général, avec qui j'ai eu une conversation assez longue et qui m'a surpris par sa culture et par la pénétration dont il faisait preuve devant cette peinture. -- Comme quoi !

 

    Le dimanche précédent, j'ai fait une lecture dans un grand squat de Rivery (en banlieue d'Amiens), dix-huit occupants, un ancien haras. J'ai lu dans le grand manège, dont la ruine est bien avancée.

 

   Sinon, je lis Adalbert Stifter, autant que mes yeux me le permettent ; et l'anthologie de la poésie allemande de la Pléiade. -- Est-ce que tu connais les paroles de l'Hymne à la Joie, je veux dire le poème de Schiller ? C'est extraordinairement extraordinaire ! Je vais de surprise en surprise dans cette anthologie.

 

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    Avec toute mon amitié,

 

Ivar