Bonjour Laurent, 

 

 

 

J’ai bien reçu Cela. Je t’envoie quelques citations en désordre afin de te remercier. 

 

 

 

 

Divagations de la Méthode 003 

 

 

 

 

« Il y a une vérité dans la tautologie. (…) « Ce qui est, est. », mais le second « est » n’a, si tout va bien, pas le même sens que le premier ! »  Jacques Rivette 

 

 

 

« Je cours à un pont.

 

C’est grande satisfaction que de voir cette force qui s’échappe

 

A l’emprisonnement du présent et donne du futur au paysage. »   Jacques Darras 

 

 

 

« C’est à cause du langage, probablement, que nous avons l’impression de faire partie du monde sans en faire partie : le langage nous permet de bénir le monde, de glorifier son éclat mais dans le même mouvement il nous en exile, parce que nous sommes seuls à l’avoir. C’est cela aussi le paradis terrestre perdu : se sentir étranger au monde que l’on admire, parce qu’on a les mots. »  Michel Chion (à propos de la Ligne Rouge de Terrence Malick) 

 

 

 

« Ce que le métal et la métallurgie font venir au jour, c’est une vie propre à la matière, un état vital de la matière en tant que telle, un vitalisme matériel qui, sans doute, existe partout, mais ordinairement caché ou recouvert, rendu méconnaissable. (…). La métallurgie est la conscience ou la pensée de la matière-flux, et le métal le corrélat de cette conscience. Comme l’exprime le panmétallisme, il y a coextensivité du métal à toute la matière, et de toute la matière à la métallurgie. Même les eaux, les herbes et les bois, les bêtes sont peuplés de sels ou d’éléments minéraux. Tout n’est pas métal mais il y a du métal partout. Le métal est le conducteur de toute la matière. Le phylum machinique est métallurgique ou du moins a une tête métallique, sa tête chercheuse, itinérante. Et la pensée nait moins avec la pierre qu’avec le métal : la métallurgie c’est la science mineure en personne, la science « vague » ou la phénoménologie de la matière. La prodigieuse idée d’une Vie non organique - celle-là même dont Worringer faisait l’idée barbare par excellence - est l’invention, l’intuition de la métallurgie. Le métal n’est ni une chose ni un organisme, mais un corps sans organes.  

 

Des conséquences évidentes en découlent. Cette matière-flux ne peut être que suivie. Sans doute cette opération qui consiste à suivre peut-elle se faire sur place : un artisan qui rabote suit le bois, et les fibres du bois, sans changer de lieu. (…) On définira donc l’artisan comme celui qui est déterminé à suivre un flux de matière (…). »   G. Deleuze 

 

 

Cette idée de suivre la matière c’est précisément ce que j’essaie d’accomplir par la technique  de l’entassement des aphorismes ou encore celle de la projection-tournoiement des phrases. En cela ma manière d’écrire serait artisanale. Ecrire ce serait ainsi le geste de suivre les lignes de la matière du langage, de suivre les lignes de forces de la matière du langage, de suivre les trajectoires de gravitation de la matière du langage. C’est ce que je veux dire quand je parle d’une forme d’écriture-sculpture. 

 

 

 

 

« Le penseur est heureux lorsqu'il n'a plus le choix. »  Frank Smith 

 

 

« La magie c’est quand on appelle la vie par son nom propre et qu’elle vient. » Giorgio Agamben 

 

 

« La magie comme science des noms secrets. En effet, en plus de son nom manifeste chaque chose, chaque être possède un nom caché auquel il ne peut pas ne pas répondre. Être un mage c’est connaitre et évoquer cet archi-nom. »  Giorgio Agamben

 

 

 

« Le véritable réenchantement du monde, ce serait que, soudain, sans qu’au début l’apparence des choses ait changé, toutes les lois physiques, chimiques, météorologiques varient secrètement ; toutes les innombrables fois, dans une journée, où sans même y penser, nous prenons pour assurée telle ou telle réaction des choses, nous aurions la surprise d’en découvrir une autre, sans même savoir si cette nouvelle réaction se répétera, constituant une nouvelle loi, ou si ce sera à chaque fois une réaction différente. Plus de loi de la gravité, plus de causalité, plus d’entropie : l’eau, chauffée, deviendra glaciale ; la pomme de Newton s’envolera ; la porte, cognée, n’émettra aucun son ; la main au contraire, passera au travers alors qu’elle ne pourra plus pénétrer dans l’eau. »  Dominique Noguez, Pensées Bleues 

 

 

« Sensoriellement, s’il y a un poids des couleurs (…) ne doit-on pas déduire qu’il y a une relation étroite entre le poids atomique des substances et le poids de leur coloration. » Malcolm de Chazal 

 

 

 

 

« Enfants, eux-mêmes jouets turbulents

 

   Qu’ils ne peuvent ranger. »         Emily Dickinson 

 

 

« Avec quelle joie tous se rappellent leur enfance et surtout que le sol était irrégulier. » Peter Handke 

 

 

« Les enfances solitaires sont difficilement racontables, peut-être simplement parce qu’il y a peu de personnages qui traversent le champ. Mais beaucoup d’instants. » Fréderic Berthet 

 

 

« Le devoir d’achever est le premier de nos devoirs. Et si les enfants l’ignorent c’est qu’ils ignorent mourir et l’urgence d’en finir. » Marc Cholodenko 

 

 

 

 

Post-scriptum. 

 

 

Un livre enfin qu’il serait peut-être important d’étudier : Métaphysique de l’Imagination de Cynthia Fleury.  

 

 

 

 

 

 

 

                                                                                                                    A Bientôt        Boris

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Merci Boris pour ces belles citations. J'aime particulièrement celle de Franck Smith (sans savoir pourquoi). Mais les autres sont bien aussi ! Celle d'Agamben sur la magie s'applique parfaitement à mon Cela. "Cela" c'est le nom propre de la vie, oui. 

 

Tu ne me dis rien de Cela directementAs-tu aimé ? Été déçu ? Insurpris ? (Je cherche l'anthonyme de "surpris" et je ne le trouve pas, ça n'existe pas ?) Bon mais comme tu m'envoies des citations plus ou moins en rapport avec la tautologie ou avec la magie,  je me dis que c'est ainsi que tu réponds et ma foi ça me va.

 

(…) 

 

Bien à toi,

 

Laurent 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Bonjour Laurent, 

 

 

 

Je n’ai pas encore lu Cela. Je te dirai mon sentiment à propos du livre quand je l’aurai lu avec attention. 

 

(…) 

 

 

 

 

 

 

                                                                                                                    A Bientôt        Boris