Art

 

 

 

 

 

 

 

L’art donne une forme au monde sans que cette forme révèle obligatoirement un sens. L’art affirme l’apparition d’une forme comme particularité d’équilibre

 

du chaos.

 

 

 

L’art méprise le tout. Donner une forme au monde ruine avec précision l’insignifiance du tout.

 

 

 

 

 

L’œuvre apparaît comme un visage, c’est-à-dire comme la violence de la pudeur à tu. L’œuvre apparaît comme un visage alibre par contumace. L’œuvre apparaît aveugle et l’œuvre aveugle celui à qui elle apparaît. L’œuvre surgit comme la catastrophe impeccable de la mystification du oui.

 

 

 

L’œuvre d’art survient comme un visage aveugle. L’œuvre d’art ne voit pas la grâce qu’elle montre. L’œuvre d’art survient comme la posture d’aveuglement d’une souveraineté à l’abandon.

 

 

 

L’artiste n’a pas la sensation du visage qu’il montre. La malédiction de l’artiste est de rester le seul à ne pas contempler le visage qu’il invente. La malédiction de l’artiste est de ne jamais tomber amoureux du visage qu’il crée.

 

 

 

 

 

L’œuvre métamorphose la chute en demeure.

 

 

 

L’œuvre envisage la certitude de la chair à la surface du destin.

 

 

 

L’artiste jongle avec son œuvre au dos de la certitude de sa chair.

 

 

 

L’artiste plaisante la gravitation de son œuvre au dos de l’extase du sang.

 

 

 

 

 

L’œuvre offre un futur à l’oubli.

 

 

 

L’œuvre d’art provoque la joie d’oublier la distraction de Dieu.

 

 

 

L’œuvre d’art projette une machine paradoxale à l’intérieur de la chair.

 

 

 

L’œuvre d’art apparaît comme une machine à mémoriser le vide du bonheur.

 

 

 

L’œuvre d’art projette les postures de vide du bonheur à l’intérieur du feu de la conversation de la chair.

 

 

 

 

 

L’art n’engendre pas, il œuvre. L’art méprise la reproduction de l’être vivant. L’art ne reproduit pas l’être, il répète l’apparaître. La volonté de l’art transforme la subjectivité en chose d’apparition de la certitude. L’art affirme que le créateur est dérisoire face à ce qu’il crée. L’art ne croit pas à la grandeur de l’homme, il affirme la démesure d’une extase qui le dévore. L’art répète la chose d’innocence de la monstruosité. L’art répète la chose de silence de l’immortalité comme poussière de sang du paradis. L’œuvre d’art donne à sentir la pourriture impeccable de l’extase d’exister à blanc.

 

 

 

Le père reproduit sans engendrer. Le père apporte la vie cependant il ne la porte pas. La mère engendre sans créer. La mère porte la vie cependant elle ne provoque pas son envol. La violence de l’œuvre incarne le destin immédiat d’apparaître en dehors de l’engendrement et de la reproduction.

 

 

 

La solitude de l’œuvre affirme la chose inhumaine de l’existence. La solitude de l’œuvre affirme l’existence comme chose inhumaine d’une rencontre taboue avec le monde.

 

 

 

 

 

Le faussaire reproduit l’aspect de l’œuvre qu’il copie cependant il ne donne jamais à sentir la forme de cette œuvre. En effet il n’a aucune intuition de la force qui parvient à inventer une forme. Le faussaire reproduit le résultat d’une volonté créatrice sans jamais évoquer cette volonté même. Il ne reproduit pas l’incroyable déluge de ratures qui provoque l’apparition de l’œuvre.

 

 

 

Il est possible de reproduire l’aspect d’une œuvre, cependant il apparaît tabou de reproduire la force qui la provoque. Il apparaît tabou de reproduire l’aura d’une œuvre à savoir le rythme de sa formation; sa trajectoire, ses élans, ses errances, ses essais, ses paradoxes. Il apparaît tabou de reproduire la précision inexorable d’une œuvre c’est à dire l’extase inachevée de sa volonté.

 

 

 

 

 

La peinture ne révèle pas le visible. La peinture n’est pas une vision qui révèle un objet. La peinture donne à sentir la chose du regard en dehors du voir. La peinture touche la chose d’aveuglement du regard. La peinture figure la respiration d’aveuglement du regard.

 

 

 

La peinture montre la coïncidence du regard avec sa disparition. La peinture donne à sentir la catastrophe épidermique des yeux, la chute tactile du regard. La peinture projette la crampe du regard à l’intérieur de l’extase aveugle de la main. La peinture pose le séisme de sang du regard à l’intérieur de l’extase de certitude de la main.