Mémoire

 

 

 

 

 

 

 

La mémoire ausculte les nébuleuses.

 

 

 

La prolifération de tact de la mémoire transforme la chair en utopie de clarté.

 

 

 

La mémoire ressemble à un brouillard en équilibre propulsif. La mémoire ressemble à un brouillard qui tient en équilibre comme une bicyclette.

 

La mémoire dort crucifiée par le fil du labyrinthe sur lequel elle marche.

 

La mémoire a la forme à la fois d’un pari et d’une acrobatie. Celui qui tente de mémoriser quelque chose se transforme en contorsionniste de la force de gravitation. Afin de sauvegarder intacte la passion de son passé, il essaie ainsi d’aller dans le sens inverse de la révolution de la terre sans malgré tout jamais savoir dans quel sens la terre tourne.

 

 

 

 

 

La forme impeccable de la mémoire ne sauvegarde que le style de la disparition des événements.

 

 

 

Il reste préférable plutôt que de se souvenir des événements de sa vie d’apparaitre comme la mémoire de la coquetterie de son sommeil.

 

 

 

L’instant où la chair tombe avec désinvolture à l’intérieur du sommeil est celui de la métamorphose du savoir en mémoire. C’est pourquoi l’insomniaque dispose d’un savoir sans mémoire. Le savoir de l’insomniaque n’est que hantise, hantise au-delà de la mémoire et de l’oubli.

 

 

 

 

 

Il est difficile de se souvenir avec netteté de la chronologie des événements. Cependant il serait à l’inverse fou de se souvenir exclusivement de la chronologie sans jamais se souvenir des événements eux-mêmes. Il serait fou de se souvenir exclusivement de la succession de jours, exclusivement des dates sans jamais se souvenir des événements qui ont eu lieu à ces dates.

 

 

 

Celui qui par extrême naïveté serait incapable de croire à la vérité des heures et des dates deviendrait semblable à un séisme de mémoire du ciel.

 

 

 

Inventer par ascèse une forme de mémoire qui esquiverait le souvenir des événements que nous avons vécu l’année antérieure. Inventer par ascèse une forme de mémoire où le délai entre un événement et son souvenir serait à chaque fois d’un an. Entre l’événement et son souvenir apparaitrait quelque chose comme une couleur, une couleur d’amnésie, une couleur d’amnésie comme l’implosion de pudeur de la vitre du temps.

 

 

 

 

 

Le souvenir est le visage même du retour. C’est pourquoi le souvenir ne connait jamais l’événement même de se retourner.

 

 

 

Il serait préférable de se souvenir des mains et de l’odeur d’un corps avant de se souvenir de son visage.

 

 

 

 

 

Les souvenirs insinuent des vitres de hurlements.

 

 

 

L’équilibre du souvenir révèle l’absurdité des voix.

 

 

 

Par le cynisme du souvenir, la voix excite les odeurs.